L'écrivain, le chercheur, le militant, en un mot, l'homme d'oc Paul Burgan nous a quittés fin novembre.
Lo Congrès présente ses condoléances à la famille et à ses proches, et partage ici le dernier hommage que lui a dédié Jacques Taupiac, membre de la section Antonin Perbosc de l’Institut d’études occitanes (IEO 82) :
« Paul Burgan est né à Boulogne-sur-Gesse, le premier février 1941.
C'était le dernier d'une famille où il y avait déjà un enfant (toujours en vie et père de Patrick Burgan, né à Grenoble le 17 mars 1960, compositeur de musique connu) et une sœur (toujours en vie aussi et qui est actuellement en Provence, en maison de retraite). Des trois de la fratrie, c’est le premier à partir.
Quand il était adolescent, avec d'autres enfants de son âge, il leur arrivait d'aller en voiture au Val d'Aran (très probablement à Les ou à Bossost) pour aller jouer au football. À l'époque, il fallait passer la frontière ; il y avait les douaniers. Alors, ceux qui n'avaient pas les papiers, ils les cachaient dans le coffre de la voiture et, une fois en “Espagne”, ils les sortaient de leur cachette pour qu’ils n’étouffent pas. Et ils allaient tranquillement faire leur match de foot. Naturellement, ils se parlaient, sans aucun problème, dans le même gascon commingeois où l’on dit « eth pan, eth vin, era poma, era pera ». Et, pour franchir à nouveau la frontière, ils utilisaient une fois de plus le même stratagème.
Il a fait des études de lettres classiques à la Faculté des lettres de l'Université de Toulouse. Il a eu Jean Séguy comme professeur. À la fin de ses études, il a obtenu l'agrégation de lettres classiques. Toutefois, il ne parlait jamais de ce diplôme prestigieux. Cela faisait de longues années que je travaillais avec lui quand j'ai appris qu'il était “agrégé” en consultant Toponymie du Tarn-et-Garonne, en 2006.
Longtemps il a été président de l'Association Antonin Perbosc qui est la section du Tarn-et-Garonne de l'IEO.
Avec Joan-Loís Dutèch et moi, pendant de longues années il a travaillé à la revue L'OCCITAN.
Quand il a eu abandonné le journalisme, il s’est lancé dans la toponymie, avec l'aide d'André Lafon. À eux deux, ils ont publié deux grandes œuvres : Toponymie du Tarn-et-Garonne, en 2006, et Toponymie de Montauban, en 2014. Cette dernière œuvre leur valut des comptes-rendus “dithyrambiques”, comme me disait Paul. Cela veut dire qu'il était un des meilleurs toponymistes de l'Europe.
Longtemps il a été membre de la très ancienne chorale montalbanaise La schola du Moustier. Ils interprétaient surtout des chants religieux en latin. C'était l'amour du chant qui le faisait participer à cette activité, lui qui n'était pas croyant. Mais, il vouait un véritable culte à l'authentique laïcité qui consiste à respecter toute foi religieuse.
C'était un grand professeur, un grand occitaniste, un grand journaliste, un grand toponymiste et un grand savant.
Dans ses relations sociales, c’était souvent un ours. Mais, il cachait de grandes qualités de cœur.
Il m'a eu dit plus d'une fois qu'il était “un pessimiste actif”.
Lui qui avait comme “occitan de famille” le gascon commingeois où l’on dit « eth patron e era patrona », il était devenu capable de parler couramment le languedocien de Montauban, bien proche de l'occitan standard, où l’on dit « lo patron e la patrona ».
Personnellement, pour parler avec lui, je n'ai jamais employé autre chose que l'occitan.
Dans la dédicace qu’il m’a faite de son dernier grand livre Toponymie de Montauban (en 2014), il écrivait : « À l'ami Jacme avec toute ma considération pour son travail de savant que j'essaie d'imiter. » Je ne suis pas du tout sûr de mériter un tel compliment.
Il avait un cancer de la prostate dont il ne s'était pas inquiété assez vite. C'est ce qu'il l'a emporté. Il vient de mourir ce dimanche 27 novembre 2022, à Montauban. »