Vaquí lo polit 8 d’abrial…
Le 8 avril 2021 revêt pour les langues de France un caractère historique.
Historique politiquement tout d’abord, car la plupart des groupes politiques ont voté majoritairement, voire unanimement en faveur de la loi, conforme à la proposition du Sénat (247 pour, 76 contre). Certains députés se sont affranchis des consignes de vote de leur groupe ou, pour ceux de la majorité, du gouvernement. La bonne teneur des débats dans l’hémicycle, animés de quelques tensions, a démontré l’évolution de l’appréhension, de manière transpartisane, de la question par les représentants du peuple. Tous, même les plus réservés sur certains articles de la proposition de loi y compris le représentant du gouvernement, ont affirmé haut et fort leur attachement aux langues de France ! Alors que les langues régionales sont menacées, celles-ci comptent plus que jamais aux yeux des locuteurs, des habitants, des élus et de la société dans son ensemble. C’est un tournant.
Historique aussi concrètement, car avec cette loi les langues régionales rentrent dans le code du patrimoine au titre de patrimoine immatériel ce qui implique des mesures de protection et dans le code civil notamment pour les noms et les signes diacritiques. La loi officialise aussi l’utilisation des langues régionales dans l’espace public. Rappelons qu’il n’y a pas si longtemps un maire du Pays d’oc avait été poursuivi pour un panneau bilingue.
Pour l’enseignement la loi propose de nouvelles possibilités
- L’immersion dans l’enseignement public se trouve sécurisé.
- L’obligation du versement du forfait scolaire pour les filières associatives immersives est une bonne nouvelle pour le réseau des écoles Calandreta,
- La possibilité d’élargissement de l’offre d’enseignement afin que tout élève demeurant sur l’espace linguistique occitan et désireux d’apprendre cette langue puisse trouver satisfaction non loin de chez lui. À nos yeux, c’est la plus belle avancée.
Le Congrès permanent de la langue occitane a participé, avec les autres associations membres du collectif “Pour Que Vivent Nos Langues” (notamment pour l’occitan la FELCO, la Confédération Calandreta, l’IEO, OcBi, l’AELOC, le Felibrige, le Forum d’Oc) à l’aboutissement de cette loi.
Au nom du Congrès, je remercie tous les parlementaires qui, conscients de l’enjeu historique, ont soutenu cette proposition de loi, les présidents de Régions et de Départements, les maires et tous les élus locaux qui nous ont appuyés dans notre démarche, ainsi que tous ceux qui ont participé à cette campagne . Vous êtes nombreux à avoir interpellé vos élus et à avoir relayé l’information : cette victoire est aussi celle d’une société civile moderne, progressiste et républicaine. Voilà une belle victoire collective !
Enfin je tiens à saluer la ténacité du député Paul Molac qui voit là récompenser des efforts parlementaires datant de nombreuses années.
Cette loi, nous l’avons dit, est historique. Elle ne saurait être la seule réponse pour la survie de nos langues. C’est une étape d’un long chemin, nous le savons.
C’était déjà un 8 avril, en 2019, le Congrès permanent de la langue occitane, ELEN et Kevre Breizh, organisaient une journée de réflexion au Palais du Luxembourg en ayant invité tous les parlementaires, députés et sénateurs, à se pencher sur le sort des langues régionales en France, et notamment sur leur enseignement, suite à une réforme du bac s’annonçant catastrophique pour l’enseignement optionnel au lycée, et bien au-delà, par effets collatéraux.
Deux ans plus tard, jour pour jour, une proposition de loi sur les langues régionales, portée par le député breton Paul Molac et son groupe, a été adoptée à une large majorité en deuxième lecture à l’Assemblée Nationale. C’est grâce à un travail patient avec l’ensemble des acteurs concernés que nous avons pu rencontrer ce succès. Cette victoire est une étape qui demandera de nouvelles mobilisations, les prochaines échéances électorales seront là pour nous le rappeler.
Gilabèrt Mercadièr, président du Congrès permanent de la lenga occitana