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Circulairé Éducation Nationale 16/12/21
Circulairé Éducation Nationale 16/12/21

Cette nouvelle circulaire est issue du désordre provoqué par la lamentable censure par le Conseil constitutionnel de l’enseignement immersif, méthode pédagogique qui fait de la langue seconde à apprendre la plus utilisée dans l’apprentissage et la vie de la classe.

C’est cette méthode d’enseignement qui sauve le français au Québec et qui est employée par les lycées français à l’étranger !

Elle est pratiquée dans les écoles associatives depuis 40 ans et a été reconnue par une large majorité des parlementaires qui ont voté la « loi Molac », qui l’ouvre à l’enseignement public. C’est le premier ministre qui, pour calmer le jeu et sauver l’immersif, a missionné deux députés puis le Ministère de l’éducation nationale, qui aurait été complice de la censure... Pour trouver une solution.

Dans la nouvelle circulaire, le positif est que :

  • elle essaie de légitimer et sécuriser la pédagogie immersive, de contourner la censure du Conseil Constitutionnel,
  • elle rappelle l’intérêt et l’apport de l’enseignement des langues régionales,
  • elle actualise les circulaires précédentes et les possibilités théoriques actuelles d’enseignement,
  • elle donne l’impression qu’il y a bien une politique en faveur des langues régionales, ce qui peut aider à maintenir ou développer l’enseignement de l’occitan quand et où la pression du terrain sera assez forte,
  • elle ajoute à la liste des langues qui peuvent être enseignées le flamand, le francoprovençal, le picard et deux langues de Mayotte.

Les limites de la circulaire

Il faudra voir si le Conseil constitutionnel n’attaque pas à nouveau l’immersif pour inconstitutionnalité au nom d’une analyse idéologique et non juridique ni historique de l’article deux de la Constitution qui dit que « La langue de la République est le français ». Le Conseil Constitutionnel ne veut pas savoir qu’il avait bien été dit en 1992, quand l’article deux s’est ajouté à la Constitution, qu’il ne pouvait pas être utilisé contre les langues régionales mais que c’était pour freiner l’invasion de l’anglais... Aujourd’hui il est utilisé à l’envers ! Une révision constitutionnelle serait nécessaire mais elle est bien loin d’être gagnée.

La circulaire donne l’impression que les possibilités ne manquent pas mais tout demeure facultatif pour l’Éducation nationale. Certaines académies, certains établissements peuvent continuer tranquillement de ne rien faire et même de faire moins s'il n'y a pas assez de pression... Pour la Constitution et la loi, les langues régionales sont un patrimoine de la France... Pour le Président et pour le Premier Ministre, elles sont un « trésor national » mais chaque niveau de l’Éducation Nationale se garde le droit de les laisser périr !

Plus grave encore, la circulaire :

  • ne donne pas de statut aux langues régionales et une place spécifique dans l’enseignement comme patrimoine, ce qui les condamne en les laissant systématiquement en concurrence avec d’autres matières, en particulier les langues étrangères,
  • ne rétablit aucune des nombreuses possibilités supprimées depuis 2003.

Et plus inacceptable encore, et qui donne beaucoup à penser, c’est qu’elle cite un extrait de l’article 7 de la loi mais se permet même de l’abréger, ne la prend pas vraiment en compte et ne prévoit pas du tout sa mise en œuvre alors que c’est, avec la possibilité d’une offre par tous les élèves, l’avancée majeure de la loi1.

La circulaire est cependant un pas, mais un pas qui ne suffit pas. Les effectifs d’élèves en occitan sont en baisse. La circulaire ne les fera pas augmenter. Pour relancer l’enseignement des langues régionales, il faut :

  • un réel statut et une place pour qu’il ne soit pas systématiquement en concurrence avec d’autres disciplines,
  • des moyens, des formations. Ils ont drastiquement baissé pour l’occitan ces dernières années.
  • des décrets, des arrêtés, une nouvelle loi peut-être sur ce qu’une simple circulaire ne peut pas décider,
  • une réelle politique linguistique avec la mise en œuvre de façon volontariste par l’État et les régions de l’article 7 de la « Loi Molac » pour l’offre pour tous.

La création effective du Conseil interministériel des langues régionales, l’organisme interministériel de concertation annoncé par le Premier Ministre, qui peut contribuer à définir et mettre en œuvre les mesures et les moyens, pour « garantir la transmission » comme il a déclaré le vouloir.

Le travail ne manque pas.

Gilbert Mercadier,

Président du Congrès permanent de la langue occitane.

 

 

1 : Article 7 de loi no 2021-641 du 21 mai 2021 :
La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre III du code de l’éducation est complétée par un article L. 312-11-2 ainsi rédigé : « Art. L. 312-11-2.-Sans préjudice de l’article L. 312-11-1, dans le cadre de conventions entre l’Etat et les régions, la collectivité de Corse, la Collectivité européenne d’Alsace ou les collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution, la langue régionale est une matière enseignée dans le cadre de l’horaire normal des écoles maternelles et élémentaires, des collèges et des lycées sur tout ou partie des territoires concernés, dans le but de proposer l’enseignement de la langue régionale à tous les élèves. »